Les valeurs ont du sens. Elles irriguent et nourrissent la…
Décryptage
Qu’est-ce qui va changer pour nous dès septembre dans l’arbitrage ? Le responsable français Bruno Verfaillie fait le point sur les évolutions qui nous attendent à la rentrée et se projette sur l’avenir proche. Horizon ? Tokyo 2020.
Cette année sera marquée par l’évolution de la structure du karaté français, liée à l’évolution des régions. Qu’est-ce que cela change au niveau de l’arbitrage et des règlements ?
C’est en effet le point essentiel, dans une année qui va voir arriver pas mal de changements. Cet été, les treize responsables des ligues régionales ont été désignés. Les 23 et 24 septembre, nous nous retrouvons à Paris et c’est là que leur sera remis leur lettre de mission pour les trois ans à venir. Pour les pratiquants, à court terme, cela ne change pas leurs habitudes. Il y aura toujours des responsables locaux. Mais ces treize responsables des grandes régions auront la responsabilité d’impulser une dynamique générale, de faire passer un message clair, cohérent sur l’ensemble du territoire national. Les attentes sont importantes, nous fondons beaucoup d’espoirs sur leur action. Nous nous réunirons régulièrement et nous serons aussi en contact constant par les moyens d’aujourd’hui, notamment des visio-conférences pour être le plus efficace possible.
Concrètement, qu’est-ce que leur arrivée change vraiment ? Et quel projet souhaitez-vous mettre en place ?
Nous avions déjà fait le bilan qu’il était difficile d’agir à trente, le nombre de responsables régionaux que nous avions avant. Désormais, nous voici en nombre resserré, ce sera plus facile de travailler et de responsabiliser chacun sur son rôle de manager, d’animateur et de pédagogue. Ils auront, je le répète, un ordre de mission précis, mais aussi la formation nécessaire pour appliquer les nouvelles orientations, préparer des actions spécifiques, mettre en place un plan d’action, un projet de sensibilisation, être capable d’analyser les besoins des départements et apporter l’éventuelle assistance nécessaire, ce qui est essentiel dans cette nouvelle organisation. Nous voulons aussi harmoniser l’examen régional d’arbitrage, avoir une date commune. La cohésion de cette équipe et son efficacité doivent porter leurs fruits dans un futur proche, dans une perspective de développement.
Un développement nécessaire à vos yeux ?
L’arbitrage au niveau national se porte bien avec une augmentation des candidats. Une dynamique s’est créée depuis trois ans, quand nous avons rendu plus accessible le niveau national en ouvrant la possibilité de faire venir quelques arbitres de ligues. Cela a créé un intérêt davantage partagé, nous avons vu naître des vocations. En revanche, on constate une chute de près de vingt pour cent de candidats au niveau des départements et des ligues. À ce rythme, cela veut dire qu’en 2020, certaines ligues ne pourront plus disposer de leurs propres arbitres pour leurs événements, alors même que notre équipe de France sera pour la première fois aux Jeux olympiques à Tokyo. Nous voulons réagir par une politique nationale de motivation des jeunes. C’est l’objectif prioritaire des années à venir et pour réussir, nous comptons sur nos responsables des ligues régionales. Aujourd’hui, du stagiaire à l’arbitre mondial, nous sommes mille sept cent trente. Je souhaite que nous passions à trois mille pour assurer la sérénité de la période à venir, et notamment une explosion potentielle du nombre de pratiquants. Il faut déjà anticiper l’après 2020.
Voilà pour l’organisation à venir. Mais à quelles modifications le pratiquant doit-il s’attendre dès la rentrée ?
Nous l’avions évoqué l’année dernière pour la réglementation internationale, cette fois le Senshu (voir l’article sur ce sujet ici) arrive au niveau national dès septembre. C’est un changement important. Un autre changement important arrive lui aussi de l’international, c’est le passage de l’Atoshi baraku qui passe de dix à quinze secondes. C’est-à-dire le signal sonore qui annonce les derniers instants du combat. Cela n’a l’air de rien, mais c’est le moment où une sortie volontaire peut entraîner une disqualification directe. Cinq secondes de plus à devoir subir la pression de l’adversaire sans perdre sa lucidité, cela peut changer des choses.
Il y a aussi une évolution dans le décompte en cas de « KO » de l’un des deux combattants…
Oui, la règle des dix secondes va être modifiée. Nous avons pris conscience qu’elle est mal comprise et qu’elle a besoin de plus de lisibilité, d’autant qu’évidemment, elle concerne des cas passionnels, qui mobilisent le public et les entraîneurs. Pour que cela soit plus visuel donc plus clair, l’arbitre central, une fois qu’il aura pris connaissance de l’état du combattant tombé au sol et éventuellement appelé le médecin, lancera le chronomètre en indiquant lui-même le décompte avec le bras levé, égrenant les secondes avec les doigts. Le public pourra alors mieux comprendre que la fin du compte est irréversible, que le combat a pris fin et qu’une décision doit être prise. Celle-ci n’est pas automatique. Celui qui a frappé, ou celui qui est tombé ? Celui-là a-t-il mis exprès le visage en avant ? Simule-t-il ? Il faudra toujours décider qui est le fautif.
Il y a aussi des évolutions pour les compétitions kata…
Oui, notamment a disqualification en cas de ciseau à la tête dans les bunkaï et la comptabilité d’une faute si Ao manque de discrétion, cherche à déconcentrer quand Aka passe. Il faut qu’il reste immobile, debout ou assis. Sur le plan national, on va aussi permettre l’arbitrage à trois (au lieu de 5, NDLR) dans les zones interdépartementales et les départements pour éviter les problèmes de sous-effectif ou les débords financiers que cela occasionne pour certaines.
Quoi de nouveau sur le terrain des examens ?
En combat, nous avons déjà, depuis deux ans, la distinction entre l’examen B, qui concerne la connaissance et l’application de la réglementation, et l’examen A, qui vient deux ans plus tard et qui nous permet d’approfondir notre connaissance des candidats sur le plan de leur capacité d’analyse générale des situations et de leur capacité à agir juste. Cette distinction vient aussi en kata. La différence, c’est que celui qui n’a que l’examen B ne peut pas arbitrer au niveau national en juniors – seniors. Par ailleurs, et c’est une bonne nouvelle, nous avions fin juin quatre-vingt-dix candidats, soit le double de ce que nous avons d’habitude, pour l’examen kata qui a lieu traditionnellement en novembre. Pour ne pas perdre en qualité, pour pouvoir accompagner les candidats avec précision et exigence, et sans stress inutile, nous avons décidé de passer à deux sessions, l’une au Sud, le 25 novembre à l’occasion de la coupe de France kata à Lormont, l’autre au Nord, qui aura lieu à Lilles le 7-8 avril pour les championnats de France kata.
Et pour conclure ?
Les jeunes ! Beaucoup de choses se mettent déjà en place dans la perspective que j’ai indiquée plus haut. On dédouble le concours du Jeune Arbitre en Zones Nord et Sud, afin de permettre davantage de candidats de se présenter, certaines régions, et on peut le comprendre, n’envoyant personne pour des questions de distance. Nous voulons doubler le nombre de ces futurs arbitres, passer de trente à soixante. Pour l’instant, ce n’est possible que sur le combat. Nous verrons l’année prochaine si nous pouvons aussi le faire au niveau du kata. Ils auront lieu, au Nord, lors de la coupe de France pupilles, au Sud, pour la coupe de France benjamins, lesquelles auront lieu normalement, le 19-20 mars pour la première et le 26-27 mai pour la seconde. Par ailleurs le service de communication fédéral a produit une vidéo de promotion et des affiches incitatives en direction des clubs, pour leur permettre de promouvoir l’arbitrage chez les jeunes pratiquants. Nous sommes aussi en train de travailler à une valise pédagogique avec des fiches pour faire passer le message sous forme de jeux. Elle devrait être disponible à la rentrée 2018. Notre état d’esprit est clair : l’évolution va passer par les nouvelles générations.
Propos recueillis par Emmanuel Charlot – Sen No Sen
la rédaction