Les valeurs ont du sens. Elles irriguent et nourrissent la…
Décryptage
Du 15 au 20 mai à Eaubonne (Val d’Oise), la FFKDA organisait une session de passage du CQP, le Certificat de Qualification Professionnelle. Ce diplôme permet aux titulaires d’enseigner, contre rémunération, leur discipline en totale autonomie. En attendant le verdict du jury dans quelques semaines, les futurs enseignants nous racontent comment ils ont vécu cette semaine de formation, reviennent sur leurs motivations et leurs projets.
Gagner en crédibilité Cela fait dix-sept ans que Patrick Da Silva enseigne bénévolement le Lam Son Vo Dao, une discipline venue du Vietnam. Pour cet ingénieur informatique de 46 ans, treize fois champion de France combat, passer son CQP est d’abord un moyen d’asseoir sa légitimité en tant qu’entraîneur. « Avant, quand je disais aux gens que j’étais simplement titulaire d’un DIF, certains s’en étonnaient un peu, explique le ceinture noire 5e dang. Et puis quand, comme moi, on donne des cours depuis longtemps, on a ses petites habitudes. Cela fait du bien parfois de mettre un peu sa pédagogie à l’épreuve. Il faut se mettre un peu en danger. Mais si on a la prétention d’enseigner, de transmettre, c’est indispensable. » Bilan pour lui de la formation : « Cela m’a plutôt rassuré, j’ai pu constater que j’étais encore à la page ! » lâche t-il en souriant.
Construire un projet professionnel À 50 ans, Marie Gualdoni veut devenir professeur de Taï-Chi-Chuan et se mettre à son compte. Pour elle, le CQP était donc un passage obligé. Mais cette mère de famille y a trouvé plus qu’une simple certification. « La formation donne des clefs à ceux qui souhaiteraient créer leur propre structure. » En plus des cours portant sur la pédagogie, les stagiaires sont en effet aussi formés à la gestion administrative et à la communication. De son côté, André Ferreira, 41 ans, ne compte pas pour autant abandonner son métier d’enseignant en lycée. Il reconnaît néanmoins qu’avec le CQP, « on peut se faire un petit complément de revenu intéressant. » Se définissant avant tout comme un passionné, cet adepte du wushu a surtout hâte de mettre en application ce qu’il a appris durant cette semaine de stage.
Faire passer un message Pour Hary Randrianarisoa, 35 ans, l’envie d’enseigner est venue d’un coup. « Cet été, j’ai eu un déclic, raconte-il. Plutôt que de continuer de râler sur certaines évolutions du karaté, j’ai décidé que j’allais plutôt essayer de transmettre moi-même les valeurs qui me tiennent à cœur dans mon sport. » En quelques mois, Hary Randrianarisoa a donc passé le DAF (diplôme d’animateur fédéral), puis le DIF et enfin le CQP. « Je trouve que trop souvent aujourd’hui, le karaté est seulement considéré comme un sport de combat. Il faut frapper fort, être puissant. L’aspect compétition prend parfois le pas sur la technique, c’est dommage… Se rapprocher de la formation, c’est aussi le meilleur moyen de mieux comprendre les enjeux.» Ce qu’il retient de cette session de CQP ? « J’ai vraiment apprécié que l’on nous propose plusieurs initiations à d’autres disciplines. Je trouve qu’il y a du bon à prendre partout. »
H.Randrianarisoa
Franck Dhellin
Marie Gualdoni
Patrick Da Silva
André Ferreira
Ouvrir ses horizons Étudiant en cinquième année de médecine, Franck Dhellin pratique le karaté kempo depuis son plus jeune âge. C’est au cours d’un stage au sein d’une unité psychiatrique en milieu carcéral que le jeune homme de 24 ans a eu l’idée de proposer à ses patients des séances d’art martiaux. « J’ai senti qu’ils étaient à la recherche d’une aide extérieure, de quelque chose qui ne vienne ni des soins, ni de l’univers de la prison. » Et la pratique du karaté de permettre aux patients incarcérés de canaliser leurs émotions. « L’idée n’est pas d’enseigner à un malade emprisonné comment se battre mais plutôt comment mieux gérer son agressivité. C’est pour cela que j’avais besoin de passer mon CQP : la formation nous montre comment adapter notre discours aux différents publics.»
Appartenir à une famille S’il y a une chose qui réunit tous les candidats au CQP, c’est le sentiment d’appartenir désormais à la grande famille du karaté et des disciplines associées. « Nous avons passé une journée entière dans les locaux de la Fédération à Paris, souligne Marie Gualdoni. Le président nous a accueillis en personne et a pris le temps de répondre à toutes nos questions. Je ne suis pas certaine que cela se passe de la même façon dans les autres Fédérations ! » Pour André Ferreira, passer son CQP est un honneur mais surtout une grosse responsabilité : « Si nous sommes reçus, nous allons devenir en quelque sorte les ambassadeurs de la Fédération dans nos clubs respectifs… »
> Le CQP : Qui, quoi, où, quand, comment ? Les explications de Franck Richetti, en charge de la formation
« Le CQP Moniteur d’Arts Martiaux est un diplôme délivré par la Confédération française des arts martiaux et sports de combat (CFAMSC) qui donne délégation à la FFKDA pour l’organisation du CQP. Il y a quatre sessions de formation par an, deux pour la zone Nord, à Eaubonne et deux pour la zone Sud, à Montpellier. Pour pouvoir passer un CQP, les candidats doivent déjà être titulaires d’un DIF, le diplôme d’instructeur fédéral. Ils doivent également avoir effectué auparavant 40 heures de stage dans un club de leur choix. La formation dure 70 heures, réparties sur six journées dont une est consacrée à l’examen final. Les apprentis professeurs sont encadrés par des intervenants issus de toutes les disciplines au sein de la FFKDA. Pour être diplômés, ils doivent valider trois unités d’apprentissage qui abordent à la fois les questions de pédagogie et les problématiques liées à la gestion d’un club sur le long terme.
Une fois le CQP obtenu, les nouveaux titulaires sont autorisés à enseigner leur discipline de manière totalement autonome. Ils peuvent désormais être rémunérés pour cette activité, mais sont cependant limités à 360 heures de cours par an. »
Thomas Lecomte / Sen No Sen
la rédaction