Le TOS n’en finit plus de rouler sa bosse
À Troyes, la magie opère depuis 1985 autour de Fabrice VinotIls n’en sont pas toujours les pièces les plus visibles mais restent essentiels au puzzle qui constitue le karaté français. Eux ? Ce sont les clubs, à la rencontre desquels nous vous proposons de prendre le temps d’aller. En cette rentrée, cap sur la capitale auboise avec le TOS Karate-Do, né au milieu des années 1980 et toujours en phase avec son temps.
En franchissant le portail du 19 rue de la Tour Boileau juste après avoir emprunté le tunnel plongeant sous les rails qui mènent à la gare troyenne, une pancarte « laissez votre quotidien en entrant » aurait toute sa place pour les quelque cinq cents licenciés du Troyes OmniSports Karaté Krav Maga. Ici, ce sont 300m2 d’installations entièrement dédiées à la pratique, dont un tatami de 210m2 cerné de matériel pédagogique, qui n’attendent que d’être employés lors de la vingtaine de créneaux proposés du lundi au samedi. « Notre souci au club est de faire en sorte que nos élèves, compétiteurs ou non, s’améliorent toujours et sans cesse, trouvent matière à vouloir progresser », présente Fabrice Vinot, figure centrale de la structure depuis sa création en 1985, à la demande de pratiquants qui ne s’y retrouvaient que sur les créneaux de ce jeune de vingt ans alors tout juste de retour de son service militaire et employé d’un club privé plutôt attiré par la musculation.« Pour cela, je pense avoir réussi une chose depuis nos débuts : faire cohabiter des gens très différents dans ce micro-univers, où tous viennent s’extraire du monde tumultueux pour se transformer, en usant de valeurs comme la patience, la tolérance ou l’ouverture. Je cherche toujours à faire réfléchir sur mes séances, car l’idée n’est pas de faire de mes élèves des moutons. C’est ainsi que tous vont évoluer, et parfois même à leur insu. » Et pour que cette alchimie opère saison après saison, le club aubois, troisième plus grand de France l’an passé sur les 5200 associations affiliées à la FFK, ne manque pas de ressources.
« Jamais la même chose »
« Ceinture marron abandonné et sans professeur » comme il se définit lui-même, Fabrice Vinot a appris au gré des opportunités, des rencontres et des stages. C’est notamment auprès de Pierre Portocarrero, Gérard Chemama, Hironori Otsuka et Masafumi Shiomitsu (plus de cent-trente stages auprès du fils du fondateur du style Wado-Ryu et de l’instructeur en chef de la Wado-Ryu Karate-Do Academy) qu’il affinera sa pratique personnelle, « sensible à l’esthétique et l’efficacité », avec l’idée de « proposer un karaté à la portée de tous » sans pour autant tomber dans la facilité. « Dès mon arrivée au club en 1993, j’ai pu apprécier sa technique exceptionnelle et l’ambiance de travail qu’il savait instaurer dans ses séances, rapporte Fabrice Sisternas, devenu président « un peu par hasard » en l’an 2000. Depuis, il demeure en éveil, n’hésitant pas à faire évoluer son enseignement de toute chose qu’il trouverait enrichissante, et à partir du moment où elle ne dénaturerait pas la pratique. »
C’est ainsi que les créneaux self-défense, lancés dès la création du club du fait de l’affection portée par Fabrice Vinot au Wado-Ryu, se muèrent en séances de krav maga, discipline au vent en poupe, il y a quelques années. « Comme disait Confucius en clamant » n’oublie pas que ton fils n’est pas ton fils, mais le fils de son temps « , j’estime nécessaire d’être dans une réflexion permanente, ce qui induit une perpétuelle remise en question, précise le 7e dan diplômé d’État. Je ne supporte pas d’entendre « un coup de poing, c’est un coup de poing » ou « un coup de pied circulaire, c’est un coup de pied circulaire », ce sont pour moi des raisonnements consternants ! Il y a certes la tradition, mais il est primordial de la faire évoluer, en évitant de rester dans sa bulle. Au contraire, je me nourris de tout ce qui m’entoure, à commencer par mes élèves. Et j’ai de la chance d’en avoir beaucoup ! (rires) » Parmi eux, trois sont devenus ceinture noire de krav maga l’an passé, mais chacun à sa façon, en fonction de ses qualités propres. Ils sont d’ailleurs nombreux à venir lui dire, saison après saison, qu’ils apprécient que ce ne soit « jamais la même chose » sur le tapis, de même qu’ils sont surpris de la manière dont chacun est considéré malgré le gros volume de pratiquants.
Toujours créer l’évènement
« Des personnes avec un prénom, et non de simples licences » qui le rendent bien à leur professeur, toujours promptes à prendre part aux manifestations organisées par le club. Les « Urban Bootcamp » font à chaque fois le plein dans les rues troyennes, avec même des participants extérieurs au TOS, tout comme les inititations ouvertes aux femmes ou les journées self-défense, qui offrent l’opportunité aux jeunes licenciés de convier une fois par an un copain sur les tatamis. Et même lorsque le karategi reste aux vestiaires, à l’occasion du Kravnaval Karnaval ou de la sortie paintball « Karaté VS Krav Maga » par exemple, l’adhésion est totale, grâce, entre autres, à une bonne communication sur les réseaux sociaux. « À chaque nouvelle idée, Fabrice la confronte à l’avis de différents membres du club, nous en discutons et nous nous lançons, tout simplement », résume Fabrice Sisternas.
De quoi permettre de déplacer des montagnes. « Quand nous avons décidé de procéder à la réfection du dojo en 2016, nous avons eu le plaisir de revoir d’anciens licenciés, partis de la région depuis longtemps, venir nous donner un coup de main plusieurs jours », salue le président Fabrice Sisternas. Pour un total de soixante-dix volontaires et passionnés à pied d’œuvre tout l’été pour offrir un véritable lifting au bâtiment tout en cimentant encore un peu plus leur fidélité au TOS. Et faire du 19 rue de la Tour Boileau leur propre dojo, là où le quotidien s’efface le temps des séances…
Antoine Frandeboeuf / Sen No Sen
Photos : TOS Karaté Do