Florentin «Une question de mental»
Championne d’Europe en mai 2016 à Montpellier, Anne-Laure Florentin sait sur quels atouts elle peut compter.
Tu as terminé troisième de l’Open de Paris en janvier, mais on t’a senti mitigée à ta sortie du tatami. C’est parce que tu avais quelque chose à prouver après ton échec aux championnats du monde ?
C’était important pour moi de vite retrouver de la confiance sur une compétition internationale où il y avait du beau monde. En plus, l’année dernière j’avais fait une belle prestation et gagné cet Open de Paris, donc j’avais envie de le remporter à nouveau. Quand tu as gagné une compétition comme ça, repartir avec une médaille moins belle, c’est forcément décevant. Je voulais l’or, c’est pour ça que j’étais mitigée. J’ai montré que j’étais toujours là, mais j’en voulais plus.
Tu as connu une année 2016 très contrastée en termes d’émotions. Qu’est-ce que tu en retiens ?
(Sourire) Comme pour l’Open de Paris : un sentiment partagé. 2016, c’était la première fois que je faisais une année vraiment complète. Je gagne l’Open de Paris, les championnats d’Europe, les championnats de France… J’avais à coeur de finir avec la plus belle des médailles sur la plus belle des compétitions. Et les championnats du monde sont venus gâcher une saison qui était parfaite jusque-là. Il ne faut pas se cacher, cela a été un gros échec.
Après ta victoire aux championnats d’Europe, tu insistais sur l’importance du mental dans ce succès. Est-ce que c’est un aspect aussi important que la technique ou le physique ?
Pour moi, c’est même plus important. Je m’en suis rendu compte au fil des saisons. Pendant des années, j’ai fait des places de troisième, je n’arrivais pas à passer le cap des demi-finales. Puis, à partir du moment où j’ai commencé à faire un gros travail mental et à me mettre dans certaines conditions en compétition, j’ai réussi à passer ce cap.
« À Linz, j’ai mal abordé la compétition. »
C’est-à-dire ?
J’ai commencé à le travailler au Creps de Châtenay-Malabry où nous devons voir une psychologue de temps en temps. Avec elle, j’ai décidé de mettre en place un travail un peu plus poussé. C’est beaucoup de dialogue. On essaie de comprendre ce qui s’est passé pendant telle ou telle compétition. Parfois, au contraire, on va se projeter, s’imaginer en situation, avec un travail de visualisation, et anticiper ce qui pourrait se passer. C’est compliqué à expliquer parce que ce n’est pas un travail sur une seule séance.
Est-ce que ta défaite aux championnats du monde est due à une faille mentale ? Est-ce que, par exemple, tu as senti la pression augmenter après ton titre européen ?
Pas plus que ça. Certes, j’étais championne d’Europe, mais ce n’était pas un travail abouti. Peut-être que les Européennes allaient vouloir me battre à tout prix, mais je ne pense pas que les filles au niveau mondial me connaissent plus que ça. En tout cas, ce n’est pas la pression qui explique ma défaite. Je pense plutôt que j’ai mal abordé la compétition. J’ai essayé de calquer ma préparation sur celle des championnats d’Europe, mais sans intégrer le fait que c’était une compétition complètement différente. J’ai fait la même préparation en oubliant de me dire « il faut que je sois championne du monde ». Je n’étais pas dedans, alors que, quand je suis arrivé à Montpellier, c’était pour être championne d’Europe. C’est pour cela que je dis que le mental est super important. Parce qu’à partir du moment où l’on se met dans sa bulle et qu’on se fixe un objectif, on met vraiment toutes les chances de son côté.
Comment se servir de cet échec des championnats du monde pour la suite ?
Le retour de Linz été compliqué. Je me suis laissée une ou deux semaines de pause pour faire un travail sur moi-même, essayer de comprendre pourquoi j’avais perdu. Parce qu’au moment où on sort de la compétition, on est juste dans la déception, on ne comprend pas ce qui s’est passé. Et puis, cette défaite m’a obligée à repartir tout de suite en sélection, avec la coupe de France à aller chercher. Ça m’a remise dans le rythme, et ça m’a redonné envie de m’entraîner et d’aller gagner. Parce qu’après un tel échec, forcément, tu as envie de te prouver à toi-même – et de prouver aux autres – que ce n’était qu’une erreur. Donc, oui, j’ai des ambitions pour la suite. Déjà, j’ai envie de doubler mon titre européen.
(Elle réfléchit) À Linz, en 2016, c’est comme si je n’avais pas été là, je n’ai pas fait le boulot. En 2018, je serai présente.
Comment vis-tu la concurrence avec Nadège Aït-Ibrahim ? Tu as dû attendre longtemps avant d’avoir ta chance dans un grand championnat. Cela a été frustrant ?
C’est frustrant parce que la concurrence n’est jamais facile à vivre. Nous avons toutes les deux envie de prouver que nous avons notre place, nous avons été à chaque fois sur les podiums nationaux et internationaux. Après, cette concurrence a un côté positif : comme il faut essayer de gagner sa place, cela nous oblige à toujours travailler plus. On se tire la bourre sur les compétitions. C’est motivant parce que je sais qu’elle ne lâche rien.
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Propos recueillis par Gaëtan Delafolie / Sen No Sen