Ce lundi 20 mai 2019, la Fédération Française de Karaté dévoile son nouveau site internet ffkarate.fr «relooké» et restructuré afin…
Mondiaux jeunes, les 5 points à retenir (2/2)
L’analyse des championnats du monde cadets/juniors/espoirsLes championnats du monde cadets-juniors-espoirs achevés, deuxième volet de notre analyse (Lire le premier volet ici) et les 5 enseignements à en retenir.
3. Des cadets et juniors français trop tendres
Partie fleur au fusil, notre élite jeune, qui ne manque pas de talent pourtant, et qui avait été six fois récompensée par la médaille d’or aux championnats d’Europe (avec la présence de Steven Da Costa tout de même) a donc chèrement payé le prix d’un manque de consistance face à des adversaires plus formatés, mais plus percutants. « Le bilan, c’est qu’on a vu des combattants français qui veulent imiter les seniors et contrôler tactiquement le combat, mais qui ne sont pas prêts à le faire » juge Dominique Charré.
La solution à moyen terme ? La mise en place d’un cahier des charges technique pour ramener le karaté au centre des préoccupations des clubs d’accession au haut niveau. La possibilité aussi de tirer en compétition dans la catégorie d’âge au-dessus, pour aguerrir les cadets et juniors. Yann Baillon dixit : « On a un peu perdu de vue peut-être que sur ces catégories d’âges, il faut s’assurer que nos combattants ont tous travaillé les gestuelles fondamentales et qu’ils ont confiance dans leur gyaku au corps en contre, par exemple, parce qu’ils l’ont déjà répété dix mille fois. Il n’y a rien de pire qu’un karaté ambitieux sur le plan technico-tactique, mais qui n’a pas les moyens de ses ambitions. Quand je vois comment les nations fortes travaillent sur un profil-type, je me dis aussi que nous devons rappeler nous aussi revenir sur nos fondamentaux, c’est-à-dire une bonne technique de base. J’ai laissé les entraîneurs nationaux dans une complète autonomie à ce niveau sur cette première étape, mais je souhaite que dans l’avenir, nous travaillions ensemble pour parler tous le même langage, avec un fil conducteur au niveau technique, dans le projet commun de faire s’exprimer un karaté simple et efficace techniquement, selon le modèle français et en adéquation avec cette catégorie d’âge ». Et le DTN enfonce le clou : « Dans la situation actuelle, nous allons resserrer nos objectifs vers la performance. On emmènera en championnat des équipes réduites, mais avec la volonté et les moyens. Il n’est plus question d’amener ceux qui ne sont pas prêts ».
4. Des espoirs qui rassurent
Si de beaux avenirs se cachent sans doute dans les parcours inaboutis de certains, pour ce qui concerne les espoirs français, c’est au présent que se conjugue le temps des promesses. Trois finales, deux titres pour eux en combat, auxquels s’ajoutent la médaille de bronze en kata de Loick Trainer, et celles obtenues par les combattants juniors, Louloa Valsan et Kilian Cizo, un champion d’Europe pas dans un très grand jour, mais tout de même médaillé mondial après l’or continental. Cizo ? Un garçon qui n’est pas encore espoir, mais qui fréquente déjà le Pôle de Châtenay-Malabry. Et c’est ce qui fait la différence. Il y a eux et les autres.
Léa Avazeri, Gwendoline Philippe, Jessie Da Costa, trois finales, deux titres. Et cela aurait pu être encore meilleur si Jessie Da Costa n’avait pas été un peu trop généreux en finale face au magnifique combattant égyptien Ahmed Elmasry, qui l’obligeait à revenir de deux coups de pieds successifs. Si Sabrina Ouihaddadene ne s’était pas fait disqualifier un peu bêtement alors qu’elle menait un combat important, ou si Aurore Bourçois n’avait pas rencontré trop rapidement l’Espagnole Nadia Gomez-Morales, future médaille d’or… Mais du côté de Gwendoline Philippe, première en -61kg, ou de Léa Avazeri, première en -68kg, pas d’aléas. Une maîtrise complète de la situation qui faisait dire au coach égyptien, en parlant de Léa Avazeri : « elle est intouchable ». Laquelle Avazeri prenait effectivement la seule victoire de la France contre l’Égypte. Il n’y a pas de hasard. « Léa Avazeri est passée de trois à quatre entraînements par semaine à deux entraînements par jour. Cela a été difficile au début pour elle, mais le résultat, c’est qu’elle est championne d’Europe espoirs, et qu’elle a surclassé tout le monde sur ce championnat du monde. Comme Gwendoline Philippe, elle est engagée dans une démarche quasi professionnelle et cela se voit par les progrès qu’elles ont fait et les résultats qu’elles obtiennent », explique Yann Baillon. L’environnement du Pôle, c’est peut-être ce qui manque au prometteur champion d’Europe juniors 2016 Dnylson Jacquet, lui qui est du même club que Philippe (Samouraï 2000 Le Mans), mais n’a pas fait la démarche d’intégrer. Pour Yann Baillon, la belle réussite des athlètes de Châtenay est encourageante et dicte le chemin : « Dans un futur proche, nous allons intégrer plus de combattants dans une démarche de formation, non seulement pour les espoirs olympiques, mais aussi pour des juniors qui seront peut-être ceux qui seront à Paris pour défendre le karaté français en 2024. On va envisager aussi de faire entrer des partenaires, qui n’auront pas forcément tout le suivi, mais bénéficieront de l’accélération d’un entraînement régulier avec les meilleurs ».
5. Un kata plein de promesses
« La tendance du kata évolue et semble s’orienter vers plus de reconnaissance de la maîtrise technique, alors que, depuis quelques années, on était essentiellement axé sur des exécutions où il fallait « envoyer » au maximum. C’est une bonne nouvelle pour le kata français qui a une culture technique fine, d’excellents entraîneurs, mais qui était un peu bridé par les options prises à l’international. On voit aussi que l’apport de Stéphane Mari (ci-dessous avec Ayoub Neghliz), qui complète la grande expérience d’Ayoub Neghliz par son souci du détail est positif » analyse le patron des équipes de France Yann Baillon. Un regain d’optimisme qui n’est pas cette fois, justifié par l’or en équipe féminine, comme en 2015, ni même par une médaille de bronze de l’équipe masculine, laquelle échoue cette fois au pied du podium, comme d’ailleurs le champion d’Europe Micky Mrozeck en catégorie juniors. Mais par la belle dynamique des deux espoirs, Lila Bui (notre photo), 7e en affichant des progrès nets pour cette première grande compétition individuelle à ce niveau d’âge, Loick Tranier, troisième après un parcours magnifique. Sélectionné pour la compétition individuelle juniors en 2015, il ne s’était pas classé. Il bat cette fois le technicien italien pour le bronze, ramenant une médaille espoirs en kata pour la première fois depuis l’argent d’Enzo Montarello en 2013. Sans doute pas de quoi annoncer tout de suite le retour au premier plan du kata français, loin des trois titres japonais, des deux titres turcs ou des deux médaillés d’or espagnols en espoirs, aux championnats d’Europe comme aux championnats du monde, mais c’est au moins de bon augure.
Emmanuel Charlot / Sen No Sen